Page:Christie - Étienne Dolet, trad. Stryienski, 1886.djvu/66

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
40
ÉTIENNE DOLET


Étant secrétaire d’un ambassadeur à l’âge de vingt et un ans, Dolet, on pourrait le supposer, « devait être emporté par cette vague qui, à la marée montante, mène à la fortune ». Toutefois cette situation semble n’avoir pas eu d’influence sur le reste de sa vie ; elle lui permit d’étudier une année à Venise et lui assura l’amitié de Jean de Langeac qui, dans la suite, l’aida de sa bourse, et c’est tout. Dolet ne dit rien de ses devoirs de secrétaire, si ce n’est qu’il écrivit des lettres au pape et aux autres correspondants de l’évêque[1]. Nous savons qu’il avait de nombreux loisirs, qu’il étudia à Venise et qu’il put profiter de toutes les ressources que cette ville pouvait lui offrir.

La République était alors à l’apogée de sa puissance, de sa gloire et de sa splendeur. Il est vrai que les armes victorieuses des Turcs lui avaient enlevé une partie de ses possessions orientales et que le doge ne pouvait plus se donner le titre singulier, mais autrefois tout à fait justifié, de seigneur des trois huitièmes de l’empire romain. La guerre qui suivit la ligue de Cambrai avait porté à la puissance mili-

    immédiat fut Jean du Bellay-Langey. Au moment où Dolet publia son De officio legati, Langeac était encore vivant ; et en 1535 il lui avait dédié son dialogue intitulé : De imitatione ciceroniana (ad Joannem Langiacum Episcopum Lemovicensem virum eloquentissimum et eloquentium studiosissimum). Voici ce que nous lisons dans les commentaires de Dolet (vol. 11, col. 149) sur l’évêque : « Parmi ceux qui ont été ambassadeurs à notre époque, en France du moins, Jean de Langeac occupe la première place, c’est un homme également remarquable par ses capacités, par sa sagesse et par sa prudence extraordinaire. Les rois de France ont mis à profit ses rares talents et sa fidélité en diverses occasions ; et quels sont les pays et les royaumes, voisins ou éloignés de France, où il n’a pas été ambassadeur : Aussi devons-nous le croire digne non seulement des plus hautes situations ecclésiastiques et des plus riches bénéfices, mais aussi de cet honneur par lequel les Romains rendirent Sulpicius Severus immortel pour avoir accompli des devoirs analogues. Grâce à ses conseils sûrs, les intérêts de la France ont été sauvegardés dans les circonstances les plus difficiles. Grâce à lui également, les messages des rois de France ont été exécutés fidèlement. Laissez-moi ajouter que personne ne s’est montré plus obligeant et plus généreux pour les hommes de lettres, plus dévoué à tous les savants, ou plus désireux de leur rendre service ».

  1. Lettre à Budé : Orat. duœ in Thol., p. 105.