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ÉTIENNE DOLET

père ? Forcé par un préjugé qui existe encore, de cacher son malheur, sa mère lui chercha peut-être, loin de la ville qui le vit naître, un asile où ils pussent vivre ensemble, ignorés, tranquilles et à couvert de la persécution des faux dévots et des défenseurs trop réglés de la religion catholique. Il est certain néanmoins que cet enfant, destiné à paraître avec éclat dans le monde littéraire, fut perdu pour lui, ou qu’il déroba tellement son nom à la curiosité du vulgaire, que personne n’a plus parlé de son existence, ni même de sa mort[1]

Je crois pouvoir en une certaine mesure lever le voile mystérieux qui jusqu’ici a enveloppé la fin de la vie de Claude Dolet et donner sur lui et sur ses descendants quelques indications, que je laisse à d’autres mieux placés que moi le soin de compléter.

Après de nombreuses et longues recherches faites un peu de tous les côtés pour découvrir des personnes portant le nom de Dolet, j’ai trouvé à la fin que Claude Dolet vivait dans l’aisance de 1570 à 1585 à Troyes, ville importante de France pour la fabrication des papiers, où les imprimeurs de Lyon allaient chercher le papier dont ils avaient besoin pour leurs travaux ; et la publication d’une édition du Second Enfer en 1544 (par Nicole Paris) nous prouve que Dolet avait des relations dans cette ville, où je suppose qu’il a été arrêté pour la dernière fois. Parmi les manuscrits de la bibliothèque nationale se trouve une traduction française de l’Ethique d’Aristote due à Nicole Oresme[2]. Ce volume est un grand in-quarto écrit sur vélin d’une écriture du quinzième siècle, et orné de nombreuses miniatures, vignettes et lettres initiales ; sur le dernier feuillet on lit la note suivante : « Cest livre de Ethiques est de Messire Bertran de Beauvau... et le acheta à Paris le XXIIIe jour de May l'an mil CCCC quarante sept. » Et au-dessous :

  1. Vie de Dolet, p. 63.
  2. Voyez les Manuscrits français de la Bibliothèque du Roi, par A. Paulin. Paris, vol. IV, p. 430, n°7059, 551.