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CHAP. XXV. — OPINIONS ET CARACTÈRE

C’est comme érudit et comme homme de lettres que Dolet désirait être jugé par la postérité et c'est comme tel qu’elle doit le juger, et si comme érudit et comme homme de lettres nous ne pouvons le mettre sur le même rang que les deux


    ne puis me résoudre à croire que les pieux sentiments dont ces préfaces sont pleines expriment les opinions sincères de Dolet, excepté toutefois quand elles montrent les sympathies qu’il avait pour les réformateurs en tant que promoteurs de la liberté de penser et de la propagation des saintes Écritures qui étaient combattues avec tant d’amertume par les gens au pouvoir. M. Douen considère que dans la dernière partie de sa vie et en réalité depuis la publication du Cato Christianus (au plus tard en 1538), Dolet avait entièrement mis de coté les opinions qui lui avaient valu la réputation d’athée et avait adopté les idées exposées dans l’extrait que nous venons de donner du travail de M. Douen. Tout ce que je puis dire, c’est que je ne trouve rien qui donne quelques poids à cette hypothèse ; on ne trouve dans aucun ouvrage de Dolet la plus légère expression de regret pour les opinions qu’il avait fait connaître auparavant. Du commencement à la fin il est le même, il ne change rien, il ne rétracte rien. Il est surpris, il vrai, que ce qu’il a écrit soit considéré comme contraire à la foi et désire se soumettre entièrement à l’autorité, tout comme Pomponatius le fit cent vingt ans plus tôt ; et je suis obligé d’accepter les conclusions de l’auteur de l’intéressant (sinon toujours exact article sur Dolet dans la nouvelle édition de la France protestante qui dit qu’il montra jusqu’à la fin «l’esprit rationaliste qui l’inspirait quand, dix ans plus tôt, dans ses commentaires sur la langue latine, il portait toute son adoration sur l’Être suprême et sur lui seul... Sans doute Dolet employa les derniers temps de son activité littéraire à imprimer des livres protestants et à les recommander dans de pieuses préfaces, mais il pouvait favoriser la Réforme et la recommander parce qu’elle s’accordait beaucoup mieux que l’Église catholique avec les libertés de l’esprit, et ne point en accepter les dogmes. En effet, on l’a vu dans tout le cours du présent article, Dolet lui même proteste contre cet enrôlement, en confessant son pur déisme.» [Je regrette de voir que dans cet article on a reproduit un certain nombre des erreurs de M. Boulmier, je citerai entre autre sa confusion extraordinaire faite entre Jean de Langeac et Jean du Bellay Langey.] Mais bien que je ne puisse accepter les conclusions de M. Douen, je ne l'en remercie pas moins des articles qu’il a consacrés à mon livre et je puis assurer à mes lecteurs qu’ils les trouveront dignes de leur attention. Au sujet des opinions religieuses de Dolet, il me reste à noter que parmi les livres de M. Léopold Double (n° 343 du catalogue de vente) se trouve un volume d’Heures donné comme étant à la reliure d’Étienne Dolet, et portant sur les plats la devise qu’il avait adoptée : Préservez moi, Seigneur, des calomnies des hommes. Une note de M. Lacroix, jointe au volume, tend à faire croire que cet exemplaire a appartenu à Étienne Dolet et que c’est «un témoin solennel qui vient, pour ainsi dire, après trois siècles de doute et d'erreur, réhabiliter la mémoire du célèbre imprimeur, condamné à mort, comme athée relaps.» M. Lacroix continue sur ce ton et prétend que c’est une preuve que Dolet était «un bon chrétien», attaché à la foi de ses pères, et surtout au culte de la