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ÉTIENNE DOLET

saires, ne différaient nullement du véritable athéisme[1]. Le représentant de cette dernière école était Pietro Pomponazzo, mieux connu sous le nom latin de Pomponatius, qui était le philosophe le plus distingué du temps. Né en 1462, il avait étudié la médecine et la philosophie à Padoue, où, encore jeune, il fut nommé à l’une des chaires de philosophie et se fit remarquer en défendant la pure doctrine d’Aristote (c’est-à-dire, suivant son interprétation, le matérialisme) contre Achillini, son collègue et son aîné, qui suivait les enseignements et la doctrine d’Averroès. Ce fut en 1516 que Pomponatius publia le traité qui a pour titre : De immortalitate animae, et dans lequel il soutient qu’on ne trouve pas dans Aristote la doctrine de l’immortalité, que cette croyance est contraire à la raison et ne se fonde que sur les vérités révélées, et sur l’autorité de l’église, deux choses pour lesquelles il témoigna d’un respect sans limite, lorsque son ouvrage fut attaqué. Contarini, l’un de ses disciples, réfuta son livre, qui fut condamné par l’inquisition et brûlé en place publique à Venise. Mais Pomponatius trouva un défenseur en la personne de Bembo, l’ami constant et le protecteur de la liberté de penser, et, grâce à son influence, le livre put être imprimé avec quelques corrections ; son auteur affirmait qu’il n’était nullement contraire aux vérités révélées et à l’église, et qu’il ne niait en aucune façon la doctrine de l’immortalité, mais simplement les arguments philosophiques dont on se servait généralement pour soutenir cette doctrine. N’oublions pas toutefois que c’est là le langage courant de la philosophie du seizième et du dix-septième siècle, qu’on doit juger d’après la philosophie elle-même, mais non pas d’après le langage apologétique des philosophes[2].

  1. Richter : Geschichte der chr. Phil., p. 390 et suivantes ; Renan : Averroès, p. 353 ; Tenneman : Manuel, p. 293.
  2. Voyez sur Pomponatius, outre les autorités mentionnées dans la note précédente, Brucker : Hist. Phil., I vol. 104 ; Buhle : Geschichte der neueren Philosophie, vol. Il ; Pietro Pomponazzi, Studi storici sulla scuola Bolognese e