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CHAP. XXIV. — LA PLACE MAUBERT

Sus donc, esprit, laissés la chair à part,
Et devers Dieu qui tout bien nous départ
Retirez-vous, comme à votre rampart,
Vostre forteresse.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Mais vous esprit, qui sçavez la parole
De l’Eternel, ne suivez la chair folle ;
Et en celuy qui tant bien nous consolle,
Soit vostre espoir.

Si sur la chair les mondains ont pouvoir
Sur vous, esprit, rien ne peuvent avoir ;
L’œil, l’œil au ciel, faictes vostre debvoir
De là entendre.

Soit tost ou tard, ce corps deviendra cendre ;
Car à nature il fault son tribut rendre,
Et de cela nul ne se peult deffendre ;
Il fault mourir.

Quant à la chair il luy convient pourrir ;
Et quant à vous vous ne pouvez périr :
Mais avecq Dieu tousjours debués fleurir,
Par sa bonté.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Sus, mon esprit, montrés vous de tel cueur ;
Vostre asseurance au besoing soit cogneue ;
Tout gentil cueur, tout constant belliqueur,
Jusque à la mort sa force a maintenue[1]
.

Le 2 août 1546, le premier président Lizel siégeant dans la Grand’Chambre, déclara Dolet coupable de blasphème, de

  1. Ce cantique si plein d’émotion, dernière œuvre d’Êtienne Dolet, est resté en manuscrit pendant plus de deux siècles. Il tomba dans les mains de Guillaume de Bure et fut communiqué par lui à Née de la Rochelle, lequel l'imprima dans sa vie de Dolet (p. 142).