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CHAP. XXIII. — LE SECOND ENFER

le privilège royal qui lui permettait d’imprimer les livres composés et édités par lui ; et il ne demande maintenant que de dire un simple mot au roi en sa faveur. Mais c’est dans l’épitre à ses amis, qui est la dernière du Second Enfer, que l’auteur est le plus éloquent. Il ne s’agit plus d’excuses, il ne s’agit plus de justifications, il ne s’agit plus de plaintes ; et en vrai disciple de Cicéron et de Platon, certain de son innocence, certain de son intégrité, il est prêt à attendre les arrêts du sort, que ce soit la vie ou la mort :

Bon cueur, bon cueur ; c’est à ce coup
Que Fortune a faict son effort,
Pour me dresser du mal beaucoup :
Mais tousiours je suis le plus fort,
Car combien qu’elle tasche fort
De ruiner ce peu de bien,
Que j’avoys quis par bon moyen,
Toutesfois, l’esprit me demeure.
Parquoy oster ne me peult rien
Que ne recouure en bien peu d’heure.
C’est assez, que l’esprit s’asseure,
Et qu’il ne perd point sa constance :
Yicteur sera (c’est chose seure)
Du monstre armé a toute oultrance
O que Vertu a de puissance !
O que Fortune est imbecille !
O comme Vertu la mutille
Quand elle prend le frein aux dents ?
Vertu n’est jamais inutille !
Les effects en sont evidents.
Ne plaignez doncq mes accidents
Amys : doulcement je les porte,
Et me ry de ces incidents
Car Vertu tousiours me conforte
Tant, que j’espere faire en sorte.
Que Fortune à moy attachée,
La première en sera faschée: