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CHAP. XXIII. — LE SECOND ENFER

Maulx infiniz, et oultrages enormes ?
Il n’est pas temps, ores, que tu t’endormes,
Roy nompareil, des vertueux le père :
Entends tu point, au vray, quel vitupère
Ces ennemys de vertu te pourchassent,
Quand les sçavantz de ton royaume ilz chassent,
Ou les chasser a tout le moins prétendent ?
Certes (grand Roy) ces malheureux entendent
D’anihiler devant ta propre face,
Et toy vivant, la bienheureuse race,
Des vertueux, des lettres et lettrez.

Tout ce qu’il demande au roi c’est de pouvoir retourner en France, de demeurer tranquillement à Lyon, de se consacrer aux études littéraires.

«Ces vers, comme vers», nous dit M. Aimé Martin, «sont loin d’être admirables, mais que de noblesse, que de courage dans les sentiments qu’ils expriment, dans les vérités qu’ils proclament ! Attaquer ainsi face à face les ennemis de l’humanité, porter la lumière dans le cœur des rois, leur apprendre ce que personne n’ose leur dire, et ce qu’ils ont tant d’intérêt de savoir, faire reposer leur gloire sur l’intelligence et le bonheur des peuples, ce serait encore aujourd’hui bien mériter des hommes ; dans ces temps de superstition, c’était se dévouer à la mort[1]. »

Les épîtres au duc d’Orléans, au cardinal de Lorraine, à la duchesse d’Étampes et à la reine de Navarre, ne sauraient nous arrêter longtemps.

Dolet y redit qu’il est innocent, il raconte comme quoi il a été arrêté injustement, et demande à ces personnages puissants leur appui auprès du roi. Pans son épître au parlement de Paris il se hasarde à aller plus loin encore, il se défend lui-même, il défend ses actes et indirectement la littérature en général, en faisant entendre les accents d’une noble indigna-

  1. Réhabilitation (p. 8), mise en tête de la réimpression du Second Enfer. Techener 1836.