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ÉTIENNE DOLET

avoir de le juger et de se donner le titre d’inquisiteur de la foi[1].

Les lettres patentes retirant l’acte d’appel du parlement et l’envoyant au grand Conseil n’eurent pas d’autre effet que de causer du retard, car ou le Conseil lui-même rejeta l’appel et remit l’affaire au parlement une seconde fois, ou les ennemis de Dolet obtinrent la révocation des lettres patentes. Tout ce que nous savons avec certitude, c’est que quelque temps avant le mois de juin (1543), l’acte d’appel fut remis au parlement de Paris, et que le prisonnier fut amené de Lyon et emprisonné à la Conciergerie pendant les débats.

Jusque-là les efforts des amis de Dolet, pour obtenir le pardon du roi, avaient été inutiles. C’était là une tâche difficile. Il ne restait auprès du roi qu’un seul ami de la littérature et des hommes de lettres. Pierre Duchàtel, alors évèque de Tulle et lecteur de François Ier, s’était rendu indisdispensable à son maître. Il était le dictionnaire et l’encyclopédie du roi François Ier, qui avait vu et connu beaucoup de savants, avait coutume de dire que Duchàtel était le seul homme dont il n’eût pas épuisé la science après deux années d’intimité. Vif, intelligent, bien informé, ayant été dans sa seconde jeunesse tour à tour professeur, correcteur d’imprimerie, voyageur en quête d’aventures, Duchàtel était pour le roi un compagnon précieux et enjoué. Il avait fait la connaissance de François en 1536, et il s’était rapidement acquis la faveur royale qu’il conserva jusqu’à la mort du monarque. Tout d’abord fort ami des doctrines de la réforme, il professa ensuite l’orthodoxie la plus rigoureuse[2], et s’exprima parfois

  1. Matthieu Orry, soy-disant Inquisiteur de la Foy ; je ne scais, si plutost se debvrait appeller inquietateur d’ycelle. » Préface des Tusculanes.
  2. Il n’échappa point cependant à l’accusation d’hérésie. Dans l’oraison funèbre qu’il fit de François Ier, il dit que l’âme du roi était allée tout droit en paradis. Les docteurs de la Sorbonne (qu’il avait offensés en protégeant Robert Estienne) se plaignirent d’entendre proclamer une aussi horrible doctrine. Malgré sa piété, François Ier ne pouvait éviter de traverser le purgatoire. Des députés furent nommés pour aller chez le nouveau roi et accuser Duchâtel d’hérésie, Duchâtel