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ÉTIENNE DOLET

savants ; que ce fut dans ce docte langage que saint Jérôme traduisit la Bible, et que sa traduction, bien qu’on l’appelle la Vulgate, était absolument incompréhensible pour les gens du peuple à l’époque où elle fut faite !

Tandis que ces ouvrages ne valurent à l’ancien président ni louanges ni compliments de la part des catholiques, ils firent naître l’une des plus amusantes et des plus spirituelles satires que le seizième siècle, si riche dans ce genre de littérature, ait produites. Théodore de Bèze, qui ne savait pas encore qu’un air de sévérité béate était le caractère distinctif de la piété chrétienne, aidé peut-être par Viret, lequel, jusqu’à la fin de sa vie, se distingua par sa verve satirique, fit imprimer en 1553 son « Epistre de maitre Benoit Passavant en réponse à la commission que lui avait donnée le vénérable messire Pierre Lizet, ci-devant président au parlement de Paris, et présentement abbé de Saint-Victor prope muros ». On suppose que Passavant a été envoyé à Genève par Lizet afin d’y apprendre ce que l’on dit dans cette ville de ces merveilleux traités que l’auteur croyait irréfutables et propres à anéantir la république des hérétiques. Dans cette lettre, écrite dans le style des Epistolœ obscurorum virorum, le messager rend compte à son maître du résultat de son expédition, sans oublier aucune des critiques peu flatteuses dont le livre a été l’objet, et aucune des histoires encore moins flatteuses qu’il suppose avoir entendues à Genève sur le compte de l’auteur ainsi discrédité. Les plus impitoyables et les plus amères moqueries sont adressées à l’ancien président. Sa personne, ses mœurs, son ambition déçue, son style et son argumentation, rien n’est épargné. Le livre eut un succès immense. Tandis que les traités de Lizet tombèrent dans un oubli si

complet que ni La Croix du Maine ni Duverdier, bien qu’écrivant 

un demi-siècle après leur publication, ne surent en donner les titres exacts, et que Bayle ne put jamais en voir un seul et dut citer le catalogue de la bibliothèque Bodléienne comme autorité pour n’en fournir que les titres, lEpistola