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ÉTIENNE DOLET

n’était qu’un simple titre assumé par le théologien auquel le roi ou le Parlement confiait l’examen des livres ayant trait aux affaires de l’église. Mais, comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, l’inquisition exista en France de fait pendant des siècles, et encore que primitivement elle fût privée des pouvoirs étendus que lui accordèrent la piété d’Alphonse de Poitiers, de saint Louis, de Philippe le Hardi et de Philippe le Bel, elle ne cessa pas d’être une force vive, dans le midi de la France, jusqu’au milieu du dix-septième siècle.

Mais ni les amis, ni les ennemis de l’inquisition ne nous ont donné des détails suffisamment amples ou suffisamment précis sur son histoire, son autorité et sa procédure. Les écrivains qui ont traité des parlements, des lois criminelles et de l’administration du nord de la France, ont peut-être raison de méconnaître absolument son existence, car, bien que, assez souvent, l’inquisiteur général fît fonction de juge dans les procès d’hérétiques, en dehors de la juridiction du parlement de Toulouse, il semble n’avoir été, en ces occasions, que l’assesseur de l’évêque ou du vicaire général, sans exercer aucune autorité directe[1]. Nous pouvons comprendre sans peine que, pour les hommes de loi, un pareil sujet soit répugnant, et nous avons moins de peine encore à comprendre et à excuser le silence des ecclésiastiques, qui doivent se sentir humiliés à la pensée que la fille aînée de l’Église a si peu apprécié les bienfaits du Saint-Office qu’elle n’a voulu reconnaître son existence qu’en Languedoc, et en songeant que, dans ce pays où, sans nul doute, le Saint-Office exista pendant plus de trois siècles, elle lui imposa tant de restrictions que son influence bienfaisante ne put guère se faire sentir. Car nous ne devons pas supposer que les fidèles adhérents de l’église de Rome reprochent quelque chose à l’inquisition d’Espagne ou d’Italie, si ce n’est, toutefois, sa trop grande indulgence.

  1. Carcassonne était le seul endroit en dehors de Toulouse où l’Inquisition avait des tribunaux réguliers et officiels.