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CHAP. XIV. — UN HOMICIDE ET SES CONSEQUENCES

Lyon dans le dessein de venir en aide à Dolet Puisse-t-il réussir comme je le souhaite[1]

Si nous nous en tenions aux affirmations de Dolet, ses amis ne lui auraient prêté nul secours. Toujours vaniteux et ne voulant guère reconnaître les services qu’on lui rendait, il se présente ici à nous sous des couleurs bien peu favorables, car nous savons tout le zèle, toute l’énergie dont ses amis firent preuve en cette circonstance. Dans la dédicace du second volume de ses Commentaires, dédicace adressée Budé, nous lisons : «Après le terrible et affreux malheur qui, vous le savez, m’est arrivé quand il s’est agi de défendre ma vie, par quels ennemis connus et inconnus n’ai-je pas attaqué ? Ceux qui se persuadaient à tort que je leur avais voulu du mal étaient triomphants de penser qu’enfin l’heure était venue où leur haine pouvait être satisfaite. Ceux qui étaient dévorés de l’envie que leur inspiraient ma célébrité et ma gloire littéraire croyaient que le moment était venu de donner libre cours à leur envie, et, se réjouissant de me voir privé de ma quiétude et de ma tranquillité, ils me déchiraient, pour ainsi dire, de leurs malédictions. Tous ceux qui auparavant, dans ma prospérité, avaient fait quelque cas de moi, m’abandonnaient dans le malheur. Aussi, ayant à craindre mes ennemis et étant perfidement délaissé par mes amis, je n’étais pas seulement dans une situation lamentable et pénible (que j’aurais pu supporter), mais, comme chacun a pu le voir, ma vie était en grand danger, circonstance qui peut abattre faire plier le courage de l’homme le plus valeureux. Toutefois je ne me suis pas laissé aller à la désolation, et je n’ai pas voulu être assez peu viril pour me laisser entraîner par les vagues des soucis et des inquiétudes, mais hardiment, suivant les conseils de mon esprit vigoureux, je suis peu à peu sorti de ces flots de misères ; malgré les méchants projets de mes ennemis, et sans le secours d’aucun de ceux qui se disaient

  1. Manusc. Epist. Boyss., fol. XIV.