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CHAP. XII. — L’ACCUSATION DE PLAGIAT

Lazare Baïf, un exemplaire du De re navali de ce dernier qui, avec d’autres opuscules du même auteur, venait de sortir des presses de Robert Estienne, par les soins de son frère Charles. Il arriva que les feuilles des Commentaires contenant le passage relatif aux questions navales venaient d’être imprimées et que Dolet les corrigeait. Il envoya ces feuilles à Richer, tout en le remerciant de l’ouvrage de Baïf. Richer les envoya à Baïf. Charles Estienne qui devait sans doute peu après devenir le précepteur du fils[1] de Lazare Baïf, Jean Antoine, plus célèbre que son père, était très lié avec Lazare, dont il avait publié en abrégé le De Vasculis et le De re vestiaria. On ne sait au juste s’il préparait déjà un épitome du De re navali ou si l’idée lui en vint en voyant les feuilles des Commentaires. Ce qui est certain c’est que fort peu de temps après, au commencement de l’année 1537, il sortit des presses de François Estienne un abrégé du traité de Baïf, écrit par Charles Estienne[2]. Dans ce livre il accuse ouvertement Dolet d’avoir copié des portions considérables du traité de Baïf, sans que ce dernier soit nommé, se contentant de changer un mot par-ci par-là, afin qu’on ne pût découvrir son vol aussi facilement, et il essaie ensuite de montrer que là où Dolet n’a pas suivi de près le texte de Baïf, il a fait preuve d’une grande ignorance et a commis des erreurs absurdes.

Aucun passage n’est spécifié par Charles Estienne pour appuyer cette accusation de plagiat. Il donne six exemples de l’ignorance et des erreurs de Dolet, disant que ce dernier a cru que cornua voulait dire des parties de mât, qu’il a attribué à César un passage qui est de Hirtius, qu’il affirme par erreur

  1. Née de la Rochelle (dont s’inspire comme toujours M. Boulmier) dit que Lazare Baïf, l’auteur du De re Navali, était l’élève de Charles Estienne
  2. De re Navali libellus in adolescentulorum bonorum favorem, ex Bayfiivigiliis excerptus et in brevem summulam facilitatis gratia redactus. Addita ubique puerorum causa vulgari vocabulorum significatione. Parisiis, apud Franciscum Stephanum, MDXXXVII. Cet abrégé, comme ceux du De re Vestiaria et du De Vasculis, devint bien vite populaire et tut fréquemment réimprime par R. Estienne, S. Gryphius, et par d’autres, dans les vingt années qui suivirent.