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CHAP. XI. — LES COMMENTAIRES

lettres avec l’enthousiasme qu’on aurait pu attendre ; ce livre attira à l’auteur des accusations que nous jugerons peut-être comme faisant plus de tort à sa mémoire que celles pour lesquelles il fut condamné à mort. Il avait déjà offensé quelques érudits très éminents et différentes écoles philosophiques (ou non philosophiques) qui avaient alors une grande influence, et les dissertations qu’on trouve dans ce volume reproduisent sous une autre forme les premières attaques de Dolet, et lui valurent de nouveaux ennemis plus puissants que les autres. Les docteurs de la Sorbonne — pour ce qui regardait la littérature latine — assumaient et exerçaient quelques-unes des fonction-, dévolues, un siècle plus tard, à l’Académie pour ce qui concernait la littérature française, et ils étaient reconnus par les orthodoxes et par les conservateurs comme faisant autorité pour tout ce qui touchait au savoir, au goût, aux opinions reçues et à la foi ; aussi ne pouvaient-ils recevoir favorablement, même s’ils n’avaient aucun préjugé contre l’auteur, l’ouvrage d’un jeune audacieux qui les traitait de sophistes et de combibones [1], et les exposait au mépris et à la haine du monde pour avoir essayé d’anéantir l’art de l’imprimerie, ce qu’ils auraient bien voulu faire oublier, puisque leur tentative avait échoué. Les moines, les dévots et tout le parti de la réaction qui soutenaient les docteurs de la Sorbonne avaient déjà vu, d’après ses discours, ses lettres et ses poèmes, que Dolet était pour eux un ennemi implacable qui s’était jeté corps et âme dans les rangs du parti du progrès, qui s’était consacré à deux choses qu’ils détestaient de tout leur cœur, aux lettres et à la liberté de penser, qui s’était moqué sans merci des superstisions des Toulousains et qui, en montrant avec une violence et une hardiesse gratuites sa sympathie pour Jean de Boyssone et pour Jean de Caturce, avait forcé ses détracteur à ne se tenir tranquilles que lorsqu’il aurait à subir le sort de ce dernier. D’un autre côté, les moqueries manifestes dont Luther

  1. Com. vol. I. col. 266