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ÉTIENNE DOLET

suit[1]: « Loin de désapprouver le jugement de Huet, je le trouve parfaitement juste, car comment pouvons-nous croire qu’on peut juger avec compétence le style littéraire quand on est incapable de bien écrire ? Toutefois l’espèce n’est pas rare de ces critiques qui n’ont aucun tact et sont pleins de pédantisme, et qui, avec la plus audacieuse effronterie, voudraient faire passer tous les écrivains sous leur férule, tout en étant eux-mêmes remarquables surtout par leur maladresse et leur barbarie de style. » — « Il n’y a guère de plus méchant livre, » dit Ménage en parlant des poèmes latins de Jules-César Scaliger, « à peine y trouve-t-on quatre ou cinq épigrammes qui puissent passer à la montre[2]».

La violence et l’intempérance du Dialogue de Dolet n’offensèrent pas seulement les admirateurs d’Érasme, mais les propres amis de l’auteur lui en témoignèrent des regrets ; nul ne fut plus chagriné que Jean de Boyssone, cet homme sensé et modéré, qui, à cette époque, avait reconquis complètement sa chaire de professeur de droit à l’université de Toulouse. En l’année 1535 sa réputation s’accrut considérablement, grâce à une discussion publique qu’il eut avec Ambroise Catharin[3], dans laquelle il soutint avec un succès signalé que la culture littéraire, loin d’être un empêchement, était un secours pour ceux qui s’occupaient d’études de droit. Dans une lettre adressée à Dolet, écrite un peu avant la fin d’août de cette même année, après avoir rendu compte de la discussion, et fait quelques remarques sur les Commentaires de Dolet dont on attendait la publication, il continue en disant[4]: «Quant à ce que l’on pense ici de votre De imitatione Ciceroniana, bien

  1. Annales, vol. VIII, p. 16.
  2. Menagiana, II, 275.
  3. Voyez A. Touron : Histoire des hommes illustres de l’ordre de Saint-Dominique (6 vol., Paris, 1747). Tom. IV, p. 153.
  4. Correspondance manuscrite de Boyssone (Bibliothèque de Toulouse), fol. XVII. L’intérêt que le dialogue excita, est encore démontré par une lettre du même volume, fol. VI, adressée par Pierre du Châtel à Boyssone, demandant à ce dernier de lui prêter le livre.