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ÉTIENNE DOLET

vient de publier à Lyon un livre contre moi. L’auteur de cet ouvrage est Étienne Dolet... Je ne l’ai pas vu encore et quand je l’aurai lu je n’ai pas l’intention d’y répondre[1] ».

Mélanchthon, tout en critiquant l’attaque de Dolet, voulut bien convenir (ce qu’il n’avait pas fait pour la harangue de Scaliger) qu’elle méritait une réponse qui devait être rédigée si non par Érasme du moins par un de ses admirateurs. Il écrit à Camerarius en 1535 : « J’ai vu le livre de Dolet et je pense charger quelqu’un d’y répondre. Érasme n’est pas sans mériter un peu les poursuites de la Némésis qui s’attache à ses pas, mais l’impudence de ce jeune homme me déplaît[2]». Peu de temps après, il dit encore, écrivant à un autre correspondant : « Avez-vous lu le livre très impudent que Dolet a écrit contre Érasme ? J’ai veillé à ce qu’on y répondît[3] ».

La publication du dialogue contribua largement à augmenter la réputation de Dolet, et on peut dire que cet ouvrage révéla son nom au monde littéraire. Le volume qui contenait les discours n’était pas d’un intérêt général et il devait être vendu, probablement un peu par contrebande, aux seules personnes de Lyon et de Toulouse qui désiraient connaître en détail les querelles de l’auteur. Le dialogue se vendit beaucoup mieux et quels que soient les qualités ou les défauts de cet ouvrage, il montrait du moins aux gens de lettres qu’un nouvel et vigoureux aspirant aux honneurs littéraires venait d’apparaître. Le sujet du dialogue n’était pas toutefois fait pour exciter beaucoup l’attention à ce moment. Il s’était passé six ans depuis la publication du Ciceronianus. La popularité des cicéroniens était sur son déclin. Les hommes de la science nouvelle regardaient, à bon droit, Érasme comme leur grand

  1. Née de la Rochelle, dont M. Boulmier emprunte les mots ici comme ailleurs dit que ce dialogue « lui (à Dolet) valut la haine d’Érasme ». Il n’y a aucune preuve à l’appui. Les seules allusions que fait Érasme au dialogue et à son auteur sont celles que je cite.
  2. Epist. Melancthoni, lib. IV, n° 180, p. 732. (Édition de Londres, 1642, in-f°.)
  3. Epistolarum Liber, primus editus (Leyden, 1647), p. 91.