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ÉTIENNE DOLET

est mûri par l’âge et qui n’a pas été composé hâtivement. Il paraîtra bientôt sous une forme châtiée et polie, mais je me livre à ce travail sans qu’on le sache. Puisqu’il en est ainsi, attendez avec patience mes élucubrations et dans l’intérêt de votre ami permettez-lui de ne les livrer au public que dans quelque temps. Certains ouvrages que les savants jugent être rudes et grossiers plaisent quelquefois au vulgaire. Mais ce que j’ai sur le chantier maintenant — l’œuvre n’est que commencée et n’est pas encore complète — réussira, je l’espère, grâce à mes soins diligents à me concilier les suffrages des ignorants aussi bien que ceux des lettrés…

« Vous me dites de prendre garde que notre correspondance ne tombe en des mains étrangères. N’ayez aucune inquiétude à cet égard. Je détruirai vos lettres, si vous le voulez, mais je vous assure qu’elles seront si bien gardées et cachées que personne ne les verra jamais. Adieu. »

« Toulouse, 29 janvier. »

Arnoul Le Ferron à Étienne Dolet :

« Deux causes m’ont empêché de répondre plus tôt à votre lettre. L’une de ces causes c’est que j’ai été fort gravement et fort dangereusement malade ; mais me voilà rétabli et c’est pour moi un vrai plaisir de vous écrire.

« J’approuve entièrement que, suivant le précepte du poète, vous gardiez neuf ans vos ouvrages avant de les livrer au public, et j’attendrai d’autant moins péniblement vos Commentaires que je me rends compte qu’en retardant cette publication, vous n’en recueillerez qu’une plus grande gloire. Ne changez pas d’avis sur ce point, car je vois dans quel ridicule tombent ceux qui, prenant à droite et à gauche des phrases qu’ils relient mal entre elles, présentent au public des œuvres sans se rappeler le proverbe qui dit : Canis festinans cœcos parit catulos. Toutefois je ne condamne pas moins ceux qui, sous prétexte qu’ils ont publié deux ou trois brochures après