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CHAP. VII. — L’ORATEUR

quoique ce livre ait été réimprimé fréquemment et traduit en français du vivant de l’auteur, c’est un ouvrage qu’on ne consulte pas souvent, qu’on lit encore moins et qui semble du reste n’avoir que peu de valeur. Suivant La Monnoye[1], « Les Vies de Charles VIII, de Louis XII et de François Ier sont remplies de digressions, de harangues ennuyeuses, de relations hors d’œuvre et sont une peine infinie au lecteur, par la manière dont plusieurs noms, soit d’hommes, soit de lieux, y sont énoncés, lesquels n’ont pas toujours été bien expliqués par le traducteur Jean Regnard[2] ». D’un autre côté, Le Gendre[3] porte sur lui un jugement plus favorable. « Si le continuateur », dit-il, « n’écrit pas aussi poliment que l’historien (Paul-Emile) qu’il continue, du moins il est plus exact, et sans comparaison mieux informé. Son histoire est ample, sans être trop longue, et il y a beaucoup d’anecdotes et de détails curieux. » J. C. Scaliger, dont les jugements sur les ouvrages de ses contemporains reflétaient le plus souvent ses affections ou ses haines personnelles, et qui dans plusieurs de ses lettres a porté Le Ferron aux nues, avait perdu son procès au moment où parut la première édition du livre ; aussi à la fin d’une de ces lettres où perce sa mauvaise humeur il dit en parlant des Historiœ : hieptæ’sunt, pueriles sunt, semi barbarœ sunt, ineruditœ sunt[4]. Le Ferron se contenta d’éclater de rire en lisant ce jugement, et Scaliger changea bientôt de ton et se modéra considérablement. Arnoul le Ferron était aussi un helléniste accompli, c’était une distinction à l’époque où, de ce


    Scaliger nous expliquent pourquoi il donna le surnom d’Atticus à son jeune ami :

    Ferronus ille propter eloquentiam
    Puram, suavem, candidam, scitam, gravem.
    Quem ego vocavi jure primus Atticum.

  1. Note à Duverdier, vol. I, p. 155 (édition de Rigolet de Juvigny).
  2. C’est là un défaut assez commun dans les écrivains latins du 15e et du 16e siècle.
  3. Hist. de France, I. 12.
  4. J. C. Scaligeri Epistolæ ; Hanoviœ, 1612, P. 178.