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CHAP. VII. — L’ORATEUR

Et ce portrait convient précisément à son commentateur. Dans un langage pompeux et guindé — dont presque chaque ligne est défigurée par quelque barbare polysyllabe du moyen âge, inconnu même aux plus mauvais écrivains de l’âge de fer de la littérature latine — Maur explique et amplifie les lieux communs de son auteur, trouvant un sens caché dans chaque phrase et dans chaque mot, à peu prés à la façon dont les prédicateurs et les commentateurs se sont efforcés avec une verbosité oiseuse et sans portée, à fonder des systèmes théologiques sur les textes les plus ordinaires et les plus simples des saintes Écritures. C’est seulement lorsque Andrelini parle de la vieillesse, que son commentateur (vieux garçon, ayant dépassé l’âge mûr et songeant encore au mariage ) s’enflamme et devient naturel. Au sujet du vers suivant d’Andrelini : Disticha composui matura digna senecta, le vieux pédagogue fait la remarque enthousiaste qui suit : Matura, id est senili et sapienti ; maturum enim est quod sole jam coctum perfecte temperatum est. Unde per translationem maturus homo dicitur qui omnimo œtate perfectus est, quo tempore maxime sapiens habendus. Unde matura œtas : id est, senilis et perfecta ac sapiens.

Mais si les ennemis de Dolet étaient actifs et virulents, il s’était acquis et avait conservé, malgré le caractère si peu modéré de son discours et probablement grâce à une sympathie secrète pour les opinions dont il était sinon le défenseur, du moins l’apologiste, l’estime de tous ceux qui, à Toulouse, aimaient la science et le progrès. Dans le volume qui contient les deux harangues se trouvent trois livres de lettres que Dolet échangea avec ses amis. Elles paraissent toutes avoir été écrites entre la fin de l’année 1532 et le mois d’août 1534, époque à laquelle il arriva à Lyon. Plusieurs de ces épîtres, et ce sont les plus intéressantes, furent composées dans l’intervalle qui sépare son second discours de son premier emprisonnement. Deux de ses correspondants. ]ean de Pins et Jean de Boyssone, sont déjà connus de nos lecteurs,