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ÉTIENNE DOLET

— furent les premiers à former une société ; leur exemple fut bientôt suivi par les Aquitains ou Gascons, et ensuite par les Espagnols et par les Allemands. La société formée, on choisissait un saint patron et on désignait un jour pour célébrer sa fête. À d’autres égards, les étudiants semblent avoir imité ce qu’ils croyaient être les usages de l’antiquité. À la tête de chaque société se trouvait un imperator, qui convoquait l’assemblée et la présidait, et auquel on confiait le soin spécial de protéger les membres de toute attaque. La société se réunissait en comitiis centuriatis et des questeurs élus par les suffrages de tous les membres se chargeaient de toucher les cotisations ou souscriptions et d’en faire usage. Pour le jour de la fête, on choisissait l’étudiant le plus éloquent comme orateur, et son principal devoir était de prononcer l’oraison funèbre des membres décédés et aussi, paraît-il, de parler dans son discours des événements de l’année précédente, en tant qu’ils touchaient la Société ou l’université[1]. Nous pouvons facilement comprendre combien la jalousie des différentes nations était excitée par ces discours, et combien de querelles et de luttes sérieuses ils devaient amener. Il semblait qu’il y eût une animosité permanente entre les Français et les Aquitains, lesquels naturellement constituaient la majorité des étudiants ; et les désordres provenant de cette animosité poussèrent le parlement de Toulouse à publier un édit qui devait exercer une censure sur ces sociétés et probablement leur imposer des restrictions[2].

  1. Cette coutume qu’avaient les étudiants de chaque nation de choisir un orateur pour l’année n’était pas limitée à Toulouse, elle était commune à la plupart des universités. Ainsi en 1516 Ulric von Hutten fut choisi comme orateur par les étudiants allemands de Bologne. Il semblerait qu’il crût avoir parlé avec modération, mais le podestat fut d’un avis contraire, et exigea de lui qu’il quittât Bologne. Strauss : Vie de Hutten.
  2. « Facta a senatu in omneis generatim sodalitates præjudicia. » Simon Finet : In utramque Doleti orationem (argumentum) mis en tête des Orationes ; mais je n’en conclus pas, comme le fait Née de La Rochelle (qui ici comme ailleurs est suivi par Boulmier), que le Parlement ait alors réellement supprimé les associations. Il n’y a pas de doute que l’association française continua d’exister, et