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que celui de César chez les Romains, devint un titre honorifique pour les monarques suivants qui appartenaient à d’autres dynasties. Vištâspa, le protecteur de Zarathoustra, est appelé, dans les Gâthàs, Kavi Vištâspa, n’étant en réalité qu’un prince provincial (danhupaiti, dahyupati) peu puissant.

Cet état de choses apparaît avec le plus de netteté à l’est, dans le pays de l’Avesta. Dans l’Iran occidental, la base patriarcale de la société se cache en partie sous une surface empreinte de civilisation babylonienne. L’Empire achéménide, dont les centres (Babylone, Suse) étaient situés en dehors du territoire iranien, fut la continuation des Empires assyriens, babyloniens et élamites; le système politique achéménide est celui des rois babyloniens, perfectionné par le génie organisateur de Cyrus et surtout de Darius. Mais l’organisation patriarcale n’avait pas cessée d’exister. Elle vivait dans le pays des Mèdes, où le guerrier Cyaxare de l’état de prince de province s’était élevé à celui de grand roi; elle vivait encore dans la Perse proprement dite, et elle apparaît dans l’inscription sépulcrale de Naqš-i-Rustam où Darius se nomme fils de Vištâspa (famille), un Achéménide (clan), un Perse (tribu), un Aryen (nation)[1]).

La Perse achéménide avait sept clans privilégiés dont un était la race royale. Hérodote s’est mépris en voyant dans les privilèges de ces clans la récompense de leur participation au meurtre du Pseudo-Smerdes, Gaumata: ils ont été les grands clans de la province de Perse, pays natal des Achéménides qui, à l’origine, en leur qualité de princes de province (dahyupati), ont été considérés par les chefs des clans (vîspati) comme « primi inter pares ». Si M. Andras a raison en présumant que les six figures placées des deux côtés du trône sur les bas-reliefs du tombeau de Darius sont les représentants des six clans et porteurs de hauts emplois héréditaires, on se figure sans difficulté, pourquoi Hérodote a nommé, par méprise, Aspathines (Aspačana) parmi les meurtriers du mage au lieu d’Ardumaniš: Aspačana est une des six figures de la sculpture sépulcrale de Darius. Hérodote a appris que cet homme-là était le chef d’un des clans privilégiés, et selon sa théorie sur l’origine des privilèges, il a dû lui réserver une place parmi les meurtriers du faux Smerdes.

Outre ce cercle de grands par naissance, il y a eu dans l’Empire des Achéménides une série de vassaux. Dans l’Asie mineure, par exemple, de vieilles maisons princières ont régné sous la suzeraineté du grand roi, soumis, cependant, à une surveillance effective de la part des satrapes. Mais, en outre, le grand roi a créé des vassaux en donnant des parties de ses domaines comme des propriétés héréditaires munies de certains avantages. La puissance des grandes familles n’est plus exclusivement attachée au petit village (vîs) de la Perse proprement dite d’où elles sont sorties, mais aussi à de grandes donations ailleurs dans l’Empire. Des gens qui n’appartenaient pas aux grandes familles, des Perses, des Mèdes, des personnages venant de toutes les contrées, même des étrangers, des Grecs exilés p. ex., pouvaient également obtenir des principautés de la libéralité du grand roi. La situation de

  1. Voir Andréas dans les compte-rendus du XIIIme congrès internat. des Orientalistes, p. 96.