— Donc, c’est dit. Je compterai à la fois sur ton obligeance et ta discrétion. N’est-ce pas, cher Alceste de mon doux rêve ?
— Oui, oui, Nisus de mes cauchemars.
Eugène Guignard est un de ces élèves qui se plaisent à voir leur avenir en noir. Parti trop vieux du foyer domestique, retenu trop longtemps dans l’isolement de la vie rurale pour ne pas en avoir conservé la timide méfiance, avec un esprit doué d’ailleurs des plus grands talents, il reste fermé aux espérances souvent frivoles de la jeunesse. Quand il songe aux jours où il devra s’engager dans la grande lutte du chacun pour soi, il sent, dans son for intérieur, quelque chose d’incapable et d’incertain qui lui demandera plus tard, à lui le fort pourtant, de s’accrocher à la remorque d’un Larive peut-être. Aussi abdiquera-t-il de bon gré, pour le moment, son ambition juvénile et le verra-t-on travailler avec ardeur au succès et à l’avantage de son ami.