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PREMIÈRE ABSENCE DE JEAN

qui vous entraîne, chaque jour d’hiver comme chaque jour d’été, combien de tâcherons touchent à la fin du mois un gain en pièces sonnantes qui ferait le bonheur de maint paysan canadien, bon an mal an ?

« Vous autres, de père en fils, vous besognez sur quelques arpents de terre pendant trente ou quarante ans, et lorsqu’arrive l’heure d’en finir, c’est encore la même terre à labourer, la même misère que vous léguez à l’enfant, quelquefois avec vos vieux jours à entretenir dans la dépendance et dans la gêne.

« La vie champêtre, elle est belle surtout pour celui qui écrit des vers, comme ton ami Virgile. Mais Virgile ignorait bien des choses que nous connaissons maintenant et je t’assure, Jean, que s’ils vivaient de nos jours et chez nous, ses bergers langoureux, fainéants et braillards, auraient bientôt fait d’en croire, par exemple, les vendeurs de papa Dupin et de courir après leurs chèvres en motocyclettes.

« On appelle ça le progrès moderne, vois-