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LE COUSIN D’AMÉRIQUE

rêve, maintenant surtout que la vue du bonheur apparent de la vie a éveillé en son esprit une appétence qu’il ne soupçonnait pas encore.

Ce projet qui s’offre aux deux cousins, au touriste riche, féru de la passion du voyage et du mouvement, à l’autre dénué, rêveur et maladif, c’est une croisière de quelques semaines dans les eaux laurentiennes. Ce sera, n’est-ce pas, à la fois, agréable et salutaire ? Émile s’enquerra à loisir des attraits si vantés du paysage canadien, sur les rives du grand Saint-Laurent, celles du sauvage Saguenay, les îles du golfe, la côte du Labrador peut-être. Jean, dont la complexion s’est anémiée dans la réclusion de ses jeunes années, retrouvera sur les eaux de mer la vigueur de ses pères.

C’était une grave détermination à prendre toutefois au gré de la mère Pèlerin, qui tout d’abord en fut comme abasourdie et n’y entendit rien ; elle qui tient rancune à la mer de lui avoir ravi et de garder toujours le bonheur et la moitié de sa vie.