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il s’enfonçait, plus les gémissements étaient distincts. Enfin il arriva à l’endroit même d’où partaient les clameurs insolites et terrifiantes. M. Painchaud ne se laissa pas dominer par la peur, comme tant d’autres moins audacieux auraient fait à sa place. Le phénomène lui apparut bientôt dans son étrange simplicité. Deux arbres inclinés l’un sur l’autre, en forme de X, ne semblaient former à leur point d’entrecroisement qu’un seul tronc, tant ils étaient rapprochés. Lorsque le vent les secouait un peu fortement, ils frottaient l’un contre l’autre ; d’où ces bruits, tantôt criards, tantôt plaintifs, suivant la violence de la tempête et la direction du vent.

M. Painchaud s’en revint tout glorieux de son exploit, qui lui avait coûté plusieurs heures de marche, et quand les gens l’aperçurent haletant, baigné de sueurs, ils crurent d’abord qu’il n’avait rien vu. Mais, jugez de leur étonnement et surtout de leur joie, lorsque M. Painchaud leur eut dit : « Mes amis, vous n’entendrez plus jamais le « braillard », je viens de lui faire bonne justice ! » Et il leur montra sa hache d’une façon très significative. De fait, il avait eu le soin d’abattre l’un des deux arbres qui, depuis des années, avaient été la terreur des marins, et des habitants de la Gaspésie.

À Matane, M. Painchaud faillit périr à l’entrée de la rivière qui est très dangereuse pour les marins inexpérimentés. Ce ne fut que grâce à l’habileté d’un jeune pilote du nom de James Forbes qu’il put échapper à un naufrage inévitable.

Le 17 septembre, il était rendu sain et sauf au rivage de la grande anse de Ste Anne de la Pocatière, pour prendre possession de sa nouvelle cure.