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quoi me refuſer des faveurs qui me ſont ſi juſtement dues ? Oui, Oronte, lui répondois-je, je veux bien de tout mon cœur être tout à vous ; mais afin que je ſois digne de votre eſtime, ne permettez pas, je vous en conjure, que je me proſtitue à toutes ces ſaletés que vous voulez exiger de moi ; épargnez ma pudeur : je ne doute point que vous ne m’aimiez ; mais il me ſemble, avec vos fureurs, que votre paſſion a plutôt le caractere de la haine que d’une amour honnête & réglée. Mon cher Oronte, au nom de Dieu, ayez pitié de moi ; ſerez-vous inſenſible aux larmes que vous voyez que je répands ?

Octavie.

Pleuriez-vous tout de bon, ma Couſine ?

Tullie.

Oui, je verſois quelques larmes, mais elles ne le fléchiſſoient aucunement ; au contraire, il devenoit plus furieux : Si vous m’aimez, diſoit-il, laiſſez-là, je vous prie, cette pudeur ſi incommode ; je m’étonne que vous en ayiez encore, après vous être expoſée toute nue aux yeux d’un homme nud comme moi : vous n’en aurez jamais plus, continua-t-il, que lors que vous montrerez que vous n’en avez point à