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ſera raiſonnable je vous chérirai tendrement, En diſant cela, elle lui donnoit des baiſers, ſed oſcula frigida, & qui n’étoient point animés de cette ardeur que la Mere des Amours nous inſpire. Vous voulez donc que je meure lui diſoit Victor, & que je ſois la victime de cette vertu qui vous ſéduit ? J’y conſens ſi vous croyez pouvoir honnêtement faire mourir un homme qui vous aime. Il tomba en effet malade de déplaiſir quelques jours après, & ſon mal s’accrut tellement, que les Médecins déſeſpérerent de ſa vie. Rodolphe étoit au deſéſpoir de perdre un parent ſi accompli, & dans la fleur de ſon âge. Clémence pleuroit, & n’étoit pas moins affligée que ſon mari, parce qu’elle ſavoit qu’elle étoit la cauſe de ſa maladie. Rodolphe voulut qu’elle allât voir Victor, d’autant que, dans la force de ſon mal, on lui avoit entendu appeller Clémence. Elle y alla ; & lorſqu’il la vit près de ſon lit, où il pleuroit, il ſourit. Il fit ſortir enſuite tous ceux qui étoient dans ſa chambre, & pria Clémence de reſter ſeule avec lui. Eh ! de quoi pleurez-vous ; lui dit-elle, pauvre mourant ? Je vous obéis ; vous m’avez condamné à la mort, & voici que je meurs. Ah Dieux ! dit-elle en eſſuyant ſes larmes, que