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voient être apparemment ſuivies de-quelques faveurs, ſi elle eût été moins fiere. Mais il n’y profita de rien ; & après l’avoir traitée d’ingrate & de cruelle, il rompit avec elle pour jamais. Ne ſachant, après cette rupture, où placer ſes affections, il jetta la vue ſur Clémence, qui étoit mariée à Rodolphe : tu ſais qu’il n’y avoit rien de plus aimable que cette jeune femme. Il lui plut ; mais de l’humeur qu’elle étoit, il n’y avoit pas beaucoup à gagner auprès d’elle. Elle ſouffroit bien d’être aimée, mais il ne falloit pas prétendre d’en venir aux effets ; volebat diligi, nolebat ſubigi. Victor reconnut bientôt le peu d’eſpérance qu’il avoit de réuſſir dans ſon amour ; il ne put néanmoins le modérer, tant il étoit charmé des belles qualités de celle qu’il chériſſoit. Il ſe plaint auprès d’elle, & ſe ſert de toutes les expreſſions les plus tendres pour la rendre ſenſible à ſon mal ; mais c’eſt ſans effet. Si vous m’aimez, lui diſoit-elle, vous ne devez pas ſouhaiter de me faire commettre un crime ; je préfere l’honnêteté à la vie, ſans laquelle elle me deviendroit odieuſe, & n’auroit plus de charmes pour moi. Aimez en moi ce que vous y trouvez d’aimable, j’y conſens de tout mon cœur ; & tant que votre amour