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rable, & la fit promptement dépouiller ; il ne lui reſtoit plus que ſa chemiſe, qu’elle lui ôta : l’amour attendrit le cœur de cette tigreſſe ; elle ne put voir la beauté du corps de Lucie, ſans en devenir elle-même amoureuſe ; & comme changée en une autre perſonne, elle ſe jetta au col de cette pauvre affligée, & la baiſa avec une ardeur extraordinaire. Ah ! ma chere enfant, lui dit-elle, que tu es agréable dans ta triſteſſe même ! ne crains plus rien, ſi tu veux être à moi, & avoir Florent en averſion. Lucie lui promit tout ce qu’elle voulut. Ah ! que je t’aime, & que je ſuis fâchée de t’avoir ainſi affligée ! n’y penſe plus, ſonge ſeulement à m’aimer auſſi tendrement que je te chéris : je veux coucher cette nuit avec toi ; mon frere eſt abſent, & je te ſervirai de mari occupant ſa place.

Octavie.

Ah ! ah ! ah !

Tullie.

Elle y coucha en effet, & remplit tout le lit de ſes fureurs : elle donna mille baiſers à Lucie, & la fatigua plus par ſes ſecouſſes, qu’elle ne l’auroit été dans les embraſſements de ſon mari. Judith s’appaiſa de la ſorte, & donna la liberté

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