Page:Chorier - L’Académie des dames, 1770.djvu/413

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 401 )


nent, il ne peut pas être ſi grand que celui que j’ai goûté avec vous, belle Octavie. Il dit cela, en me donnant un baiſer. Je ſortis, il me ſuivit à petit bruit ; nous montâmes au-deſſus de la chambre où le jeu ſe faiſoit. Il y avoit une petite fente, d’où l’on pouvoit voir tout ce qui ſe paſſoit au-dedans ſans être vu.

Tullie.

Je m’étonne comment Sempronie, qui ſait qu’une femme prudente doit tout craindre quand elle ſe divertit, ne s’eſt point apperçue de cette ouverture. La pauvre Lucie, femme d’Ulric & sœur de Fonſeque, penſa périr miſérablement par un ſtratagême ſemblable, que lui dreſſerent ſes ennemis. Elle avoit un jeune ſerviteur fort bien fait, de l’âge de ſeize ans, qui s’appelloit Florent ; il étoit fort, aimable, & digne de l’affection qu’elle conçut pour lui. Ils auroient été plus heureux dans leurs amours, ſi Pélagie, qui étoit, une fille de chambre de la maiſon, eût été moins ſenſible aux belles qualités de ce jeune homme ; mais elle en devint éperduement amoureuſe, & par conſéquent la rivale de ſa maîtreſſe. Le mépris qu’elle connut que Florent faiſoit de ſa perſonne depuis qu’il étoit dans les bonnes graces de Lucie, la mit au

Cc