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il ſe trouve une ſatisfaction hardie & tranquille, qui ne ſe rencontre point dans les autres ; outre que le mariage eſt un voile qui cache & couvre les défauts de nos comportements, puiſque nous pouvons ſans crainte & ſans haſard nous divertir, d’abord que nous en ſommes revêtues. Il y a donc des plaiſirs pour les vierges, auſſi-bien que pour celles qui ſont hors du célibat : elles peuvent trouver elles-mêmes un eſſai des voluptés que goûtent les autres ; mais bien plus pures, puiſque la diſcorde & la jalouſie ne les troublent preſque jamais. Ne ſois donc plus ſurpriſe qu’une fille conçoive de l’amour pour une autre : pour moi je brûle de cette paſſion ; & je préférerois très-volontiers tes embraſſements à ceux d’Oronte, quoique je les chériſſe beaucoup. Tu ne dois pas, ma mignonne, m’en eſtimer moins honnête ; cette humeur ne m’eſt pas particuliere : les Françoiſes, les Italiennes, & les Eſpagnoles, ſe chériſſent de la ſorte ; & ſouvent, ſi la pudeur & la honte ne les retenoit, elles ſe donneroient des marques publiques de cette paſſion, quand elles ſe voyent.

Octavie.

Ah ! que je ſuis charmée, ma Couſine, de votre entretien ! je préférerois ma condition à