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que je déchargeai une ſeconde fois pendant que j’étois ainſi ſuſpendue. Le plaiſir que je reſſentis fut ſi grand, que je ne pus m’empêcher de crier : Ah ! je n’en puis plus, mon cher Acaſte : non, Junon n’a jamais été foutue par Jupiter ſi délicieuſement que je le ſuis ; ſoutenez-moi, je me meurs ; ah ! ne vous remuez point, de crainte que je ne tombe ; ah, Dieux ! que vous me comblez de biens ! je ſuis ravie au ciel. Non, cria Acaſte, attendez encore un peu, & ne quittez point le ſéjour des mortels, que vous ne m’ayiez fait part de vos faveurs & de votre immortalité. Dans ce moment, Acaſte, que les plus violentes fureurs de l’amour avoient mis tout en ſueur, m’arroſa le dedans d’un ruiſſeau de ſemence ſi chaud, que je crus effectivement qu’il me brûloit l’ame. Le plaiſir qu’il reſſentoit de ſon côté étoit ſi doux, qu’il n’auroit pu ſe ſoutenir s’il n’eût ramaſſé toutes ſes forces dans ce moment ; il m’embraſſoit & me baiſoit ſi amoureuſement, qu’on eût dit qu’il eût voulu rendre ſon eſprit ſur mes levres. Non, Octavie, le lierre n’eſt pas plus fortement attaché au noyer, que je l’étois à Acaſte par mes embraſſements ; & comme tu vois, cette conjonction fut accompagnée de tout ce qu’on peut s’imaginer de plus lubrique & de plus cha-