Page:Chorier - L’Académie des dames, 1770.djvu/312

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 300 )


dîtes auprès d’elle, pour en avoir perdu la mémoire.

Tullie.

Eſt-ce cette même Marianne que vous donnâtes à Cléante ? Ah, que vous abuſâtes malicieuſement de la crédulité de cette pauvre fille, quoiqu’elle vous aimât tant !

Octavie.

Ah, que je ſerois aiſe d’apprendre cette hiſtoire, Cléante ! Medor, faites-m’en le récit, ſi vous voulez me faire plaiſir.

Médor.

Que Cléante faſſe l’hiſtorien ; ce fut lui qui profita de la ruſe.

Cléante.

Je le veux. Vous ſaurez qu’étant à Rome chez Médor, ſur la fin de l’automne, je devins éperduement amoureux de Marianne ; & la violence de la paſſion que je reſſentois pour elle fut ſi grande, que je crois que je fuſſe mort de déplaiſir, ſi je n’euſſe reçu du ſoulagement. Ce fut Medor qui me tira de cette langueur où j’étois, par la plus illuſtre marque d’amitié que j’euſſe pu attendre de lui. Il avoit conçu de l’amitié pour cette belle, & étoit aſſez heureux d’en être aimé ; & ſacrifiant