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vez que c’eſt le jour de poſte, & vous n’ignorez pas qu’en faiſant mes affaires, je fais les vôtres. Il vint de la ſorte ici le dixieme. Oronte le chargea de deux lettres, dont l’une étoit pour moi, & l’autre pour l’orfevre, avec ordre de le preſſer d’achever l’ouvrage qu’il avoit entre les mains. Sur-tout, lui dit-il en partant, tenez ſecret ce que vous en ſavez ; car Tullie mourroit de déplaiſir, ſi elle croyoit que j’euſſe fait connoître mes ſoupçons à d’autres qu’à elle. Sitôt qu’il fut arrivé en ville, il s’acquitta de ſa commiſſion auprès de l’orfevre ; & s’en vint enſuite à la maiſon, où il me trouva ſeule avec Sempronie. Il me donna la lettre d’Oronte, & nous fit voir le deſſein de l’ouvrage auquel on travailloit pour moi. Il me railla ſur ce ſujet : je lui dis qu’il avoit plus de ſujet de s’affliger, s’il m’aimoit, que de ſe réjouir de l’eſclavage dans lequel j’allois être. Ah ! ma chere Tullie, s’écria-t-il, tout tranſporté de joie, je ſuis le plus heureux de tous les hommes. Quel nouveau ſujet de bonheur avez-vous, lui dis-je ? apprenez-le, dit-il, puiſque vous y avez part. Pendant, pourſuivit-il, que j’étois chez l’orfevre, j’ai eu aſſez d’adreſſe pour pouvoir le détourner de ſon travail, & imprimer ſur de la cire, la forme de la clef de la ſerrure qui vous