auſſi de plus bas, de plus vil & de plus mépriſable
qu’une fille qui a été ſouillée. Mais
quoi ! quoi, ma mere, lui dis-je, que ſouhaitez-vous
donc que je faſſe ? ſi vous voulez que
je garde ma virginité ſans tache, vous pouvez
me mettre dans un Couvent ; j’y conſentirai
pour vous complaire. Non, non, ma fille,
reprit-elle, cela eſt fort éloigné de ma penſée ;
& quand vous ne ſeriez pas unique dans
la maiſon, l’amour que j’ai pour vous ne me
permettoit jamais de vous enſévelir ainſi toute
vive dans un cloître. Ce que je vous demande
ſeulement, continua-t-elle, c’eſt de conſerver
votre eſprit ſans tache, comme j’ai toujours
fait, & de retirer votre affection de toutes les
ſaletés dont votre corps doit être ſouillé. Il
eſt auſſi néceſſaire, ma chere enfant, afin de
faire une digne oblation de votre virginité,
de faire un ſacrifice qui en prévienne la perte,
& un autre qui la ſuive. J’y conſens, lui
dis-je ; mais à quel ſacrifice eſt-ce que vous
m’exhortez ? Le ſacrifice continua-t-elle, que
j’exige de toi, Octavie, a beſoin de tes mains
& des miennes pour être exécuté : il a beſoin
d’un grand courage, pour être bien méritoire ;
& je crains que les forces ne te manquent pour
une ſi ſainte œuvre. Non, non, lui dis-je, je
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