Page:Chorier - L’Académie des dames, 1770.djvu/177

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 165 )

    Del amaroſo gregge,
    Ne fu ſua dura legge.
Nota à quell alme en libertate auvez ze
    Mà legge aurea, è felice,
    Che natura ſelopi, S’ EIPTAGE EILIGE
[ws 1].

Voilà, Octavie, ce que c’eſt que l’honneur ; voilà la nature de cette honnêteté, qui te ſéduit ; juge de-là ſi elle eſt incompatible avec le plaiſir, & tire de ce raiſonnement les conſéquences qui en ſortent naturellement.

Octavie.

J’entre dans votre penſée, ma couſine ; mais pour me ſatisfaire entiérement, dites-moi pourquoi vous ne me prêchiez rien tant que cet honneur, devant que je fuſſe mariée. A quoi bon m’abuſer de la ſorte, puiſque ce n’étoit qu’une chimere ?

Tullie.

En voici la raiſon, ma mignonne. Pendant que nous ſommes filles, nous ſommes obligées de courir après ces fantômes viſionnaires, ſi nous voulons vivre heureuſes. Il n’en eſt pas de même quand nous ſommes une fois engagées dans le mariage : il n’y a plus d’in-

  1. Note de WS :
    Mais parce que l’honneur, ce tyran de nos Ames,
    Cette trompeuse idole & ce phantôme vain,
    N’avoit pas ſur les cœurs un pouvoir ſouverain,
    Et ne s’oppoſoit pas aux amoureuſes flâmes,
    On ne connoiſſoit point ſes loix ;
    Et l’on n’écoutoit que la voix
    Du plaiſir et de la nature.
    Aux rigueurs du devoir on n’eſtoit point ſoûmis,
    Et ſans ſe donner torture ;
    Ce qui plaiſoit étoit permis.

    Traduction Du Tasse (Torquato Tasso, 1583): Pastorale traduite de l’italien en Vers François, A Paris, Chez Claude Barbin, sur le second Perron de la Sainte Chapelle, 1676, Avec Privilege du Roy, Google p.52 à 54.

L iij