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mais pourquoi me propoſer ma mere pour exemple ?

Tullie.

Tu dois ſavoir, Octavie, que ta mere m’eſt auſſi connue que toi : j’ai ſouffert ſes badineries, comme tu as enduré les miennes ; & voici les regles qu’elle me preſcrivit auſſi-tôt que je fus mariée. Tu dois regarder Oronte, me diſoit-elle, comme une divinité ſur la terre ; tu dois le chérir & preſque l’adorer, & te rendre complaiſante à toutes les demandes qu’il te pourra faire, ſans t’imaginer qu’elles renferment quelque choſe de malhonnête en elles-mêmes. Voilà, Tullie, continua-t-elle, les prérogatives & les privileges de l’homme ; & voici les avantages de la femme. Elle doit croire, ſi elle eſt ſage, que comme elle eſt née pour le plaiſir de ſon mari, tous les autres hommes ne ſont au monde que pour le ſien. L’un lui eſt propre, & lui appartient de droit ; l’autre lui eſt commun avec ſon époux. Elle doit ſe changer en autant de figures que Prothée, pour lui plaire, ſi la lubricité l’exige d’elle : en un mot, elle ne doit rien négliger de tout ce qui peut ſervir à ſa convoitiſe ; pendant que ſes amants de leur côté mettront

toute