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bienfaisant sédatif finissait à la longue par envahir les tissus et y jeter un calme reposant.

La mère de Beaumont savait cela et avec cette confiance quasi hypnotique avec laquelle tout malade se leurre au début d’un traitement, elle crut éprouver un apaisement à sa douleur. Ses muscles, jusque là crispés sous la tension du mal, se relâchèrent peu à peu et elle parut bientôt doucement somnoler. Ce calme ne dura toutefois que quelques instants. Une autre sensation, qui n’était pas douloureuse celle-là, mais infiniment, atrocement angoissante sans doute, traversa aussitôt la pauvre vieille puisqu’elle se dressa sur son lit, les yeux stupéfaits et hagards, comme pour démêler ce qui se passait subitement dans son cerveau.

Son aspect était à ce moment si transformé, il annonçait chez elle une si profonde et si subite perturbation, que Yves, sans plus se rendre compte, repartit affolé à la recherche du docteur Duvert. Ce fut avec un accent de détresse véritable qu’il apprit son absence, de la bouche de Jacqueline, et sans arrêt il courut frapper chez le docteur Verneuil.

Sa course ne dura que quelques minutes. En un rien de temps il fut de retour auprès de sa mère, mais pour la trouver déjà délirante, les mains contracturées et tordues dans le vide, et comme dardant dans l’infini des yeux vagues, terrifiants à force d’être largement ouverts.

Oh ! ce regard étrange et jamais vu… Dès son arrivée, le docteur Verneuil en avait été tout de suite stupéfié. Il s’empressa d’interroger les quelques