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zouille aujourd’hui dans un commencement de sommeil.

À cause de la différence d’âge qui les sépare quelque peu, il se rencontre, ici et là, — au cours de leurs souvenirs passés — des vides qui coupent la simultanéité de leur vie de pensionnaires, mais les points communs de contact en demeurent encore très nombreux.

C’est alors entre elles un échange pressé de question, une volubilité impatiente de se répandre, des rappels joyeux de compagnes disparues, de réminiscences et d’incidents qu’elles croyaient toutes deux bien effacés et morts.

— « C’était Louise, n’est-ce-pas, qui… »

— « Mais non, c’était Marie… tu sais bien, celle qui clignait toujours si drôlement de l’oeil droit. »

Elles repassent ainsi bribes par bribes, leur passé de petites filles, d’Enfants de Marie, de communiantes, tantôt à travers de bons éclats de rire spontanés et incoercibles, tantôt sous le charme grave et silencieux de quelque lointaine illusion éteinte. Mais toute cette causerie avait porté sur l’autrefois, sur la partie de leur vie qu’elles avaient ensemble traversée, à courte distance l’une devant l’autre, et dont elles eurent vite parcouru, et épuisé les souvenirs. C’est depuis la séparation qu’elles brûlent de tout savoir, dont il leur tarde davantage de connaître les étapes intimes.

Oh ! pour Jacqueline bien peu à raconter, il est vrai, en dehors de la mort de sa mère, de son im-