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me un ressort, s’était levé, et s’inclinait maintenant sur sa main, une flamme de tendresse admirative avait rapidement traversé ses yeux. Mais aussitôt ses traits se détendirent et d’un large regard elle enveloppa Yves comme pour fouiller tout de suite ce qui lui restait encore au cœur d’ardeurs vivantes ou éteintes. Se raidissant dans un sourire forcé, elle s’était assise palpitante.

— « Et oui, » fit aussitôt la verve inlassable du docteur, « le voici, ce revenant d’un autre continent, d’un autre hémisphère, et nous le garderons pour toujours. N’est-ce pas qu’il n’y a rien, sous la calotte des cieux, de plus attirant, de plus enchanteur que la petite campagne de chez nous, avec sa rivière, sa montagne, ses vergers, ses champs, ses actifs « habitants » et qu’il fait bon de revenir dans ce charmant milieu ? »

— « C’est une confession que vous me demandez, docteur ? Eh ! bien, continua Yves, ému par la présence de Jacqueline, « je confesse que vos sentiments sont devenus les miens. Étant enfant je répétais, sans comprendre le sens caché des mots, la naïve complainte dont grand-mère Beaumont accompagnait toujours le ronflement de son rouet : « Rendez-moi mon beau pays, mes bois, ma liberté. » Plus tard, à l’usine, dans le laboratoire qui a trahi mes ambitions tout en me procurant une expérience et des connaissances qui me consolent de mes échecs, je chantonnais le même refrain sans y mettre beaucoup plus de conviction. Mais là-bas, à travers les nostalgiques visions que me renvoyaient les êtres