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Puis revenant à Yves sans s’en apercevoir, il se demandait s’il allait le trouver bien changé. Il s’attendait à le trouver bruni du moins, à cause du soleil brûlant d’Afrique, des longues marches au grand air.

— « As-tu remarqué, Marcelle, ajoutait-il, les réflexions qu’il nous communiquait au sujet des Boers ?… j’en ai été attendri. Il n’aurait pourtant rien ressenti de ça, si son âme rurale eut été tout à fait morte… T’imaginais-tu ça que ces Boers de là-bas ce sont presque les « habitants » d’ici ?… »

Et il se remettait de nouveau à penser.

— « Non, je le sens bien, » reprenait-il tout à coup avec rancœur, « on tend aujourd’hui trop de gluaux à nos jeunes paysans, selon que me le disait le docteur Duvert, on leur fait trop d’appels avec les mots de chemins de fer, de mines, d’immeuble, de spéculation, d’agiotage… « Emparons-nous du commerce, de l’industrie, des affaires !… » « Les journaux et les orateurs n’ont que ce refrain,… par ce temps d’élection surtout, où il importe pour chacun des partis politiques d’éblouir, de montrer la fortune de plus près, de revêtir de succès illusoires tous les genres d’aventures et de risques… Alors, oui, Yves va mordre de nouveau à la magie des formules, au miroitement des utopies… le vertige va le reprendre… Son expérience, au Transvaal comme ici, a dû le convaincre pourtant qu’il est certaines entreprises d’affaires, des champs particuliers d’opération impossibles à soustraire à la poigne de l’Anglais. »