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XXVII


Un long hiver avait passé sur les tragiques événements que nous venons de relater.

Les champs de la terre paternelle avaient de nouveau reverdi et, à travers les foins et les pommiers, on voyait s’agiter comme autrefois la laborieuse silhouette du père de Beaumont.

C’est que le pauvre vieux, incapable de se décider à laisser son ancienne ferme tomber entre des mains étrangères, en avait repris l’exploitation. Il lui semblait de plus qu’il ne s’acquittait que de son simple devoir. Car il se rappelait sans cesse ce sinistre soir d’automne où son fils Lucas lui était apparu avec une telle figure d’angoisse et de douleur que spontanément, sans interroger, il s’était exclamé en l’apercevant :

— « Malheureux ! C’est donc vrai que tu l’as tué ! »

— « C’est vrai », avait tout droit répondu Lucas, en prêtant l’oreille aux bruits du dehors. Puis reprenant solennellement : « Et si je ne me suis point livré, crois-moi, vieux père, ce n’est pas que j’aie