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XIV


— « Marche donc, Rougeaud… Marche donc, mon paresseux »… Et, avec une longue tige d’herbe Saint-Jean arrachée au rebord du chemin, le père de Beaumont, autant pour caresser que pour stimuler, aiguillonnait le pas, — lent et interrompu à chaque touffe provocante de trèfle — de son vieux cheval.

Le soleil était couché ; la brunante commençait à descendre et à envahir les versants de la montagne. Le père de Beaumont, avec Rougeaud libre devant lui, suivait silencieusement à pied la montée qui aboutissait à son ancienne ferme. Il rencontra un paysan, juché sur une charge de foin auquel Rougeaud mordit en passant, mais il se déroba dans l’obscurité du chariot afin de n’être pas reconnu, et il continua mystérieusement sa route… « Avance donc Rougeaud… »

Il avait presque l’allure d’un malfaiteur et il songeait : Oh ! il avait bien soupçonné ça, avec sa longue expérience de la culture, connaissant les soins égoïstes que pour se montrer généreux le sol exige constamment, il avait bien soupçonné que la misère finirait