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Claude Paysan

La bonne vieille avait été douloureusement déçue par le ton froid et insouciant avec lequel son fils avait accueilli ce qu’elle avait tant hâte de lui dire. Elle, qui s’était fait une si grande joie, durant le jour, de lui annoncer l’arrivée de leurs voisins, voilà qu’elle se butait à un sentiment presque de dédain chez lui…

Alors, pour l’attendrir, elle lui expliquait combien ils étaient bons pour eux, les Tissot, la touchante condescendance qu’ils leur avaient montrée, l’automne dernier à l’occasion de la mort du vieux Claude, les largesses dont ils les comblaient… Elle les aimait bien, elle, et comme ça la chagrinait de voir qu’il restait insensible et dur en face de ces marques de généreuses sympathies.

Claude, tout en approuvant les réflexions de sa mère, continuait à faire montre d’indifférence et, avec un air ennuyé, il se dérobait bientôt aux paroles attendries au moyen desquelles elle voulait absolument le convaincre et le pénétrer.

… Cependant un peu plus tard, la pauvre vieille s’apercevait tout à coup que son fils avait oublié de soigner ses chevaux, que les poules picoraient dans ses sacs d’avoine éventrés dans la cour, qu’il allait et venait sans cesse dans la maison sans savoir ce qu’il cherchait bien… Brusquement elle le vit partir en courant, gambadant malgré lui, comme un fou.

Gardien aussi gambadait, jappait à sa suite, sautant après lui, pour lui mordiller les coudes, en bon chien… Oui, Claude courait, ne sentant plus la fatigue ; ça n’allait plus assez vite de marcher maintenant.