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Claude Paysan

En même temps, il songeait : C’est vrai, mai ajouterait bientôt autre chose à l’embaumante verdure qui croissait de partout… La grande maison abandonnée des Tissot se rouvrirait ; comme les années passées, il en jaillirait par les fenêtres des accords tendres, des chuchotements de notes et de roulades, des chansons joyeuses qui viendraient égayer les alentours, glisser sur les flots du Richelieu… Il se proposait d’aller encore les entendre, en secret…

Il songeait toujours Claude, distraitement… puis ce serait aussi Fernande… oui, en lui-même il avait simplement prononcé : Fernande… C’était singulier, ça ne lui était pas venu à l’idée de dire : mademoiselle Fernande.

Il ne savait pas si, tête nue, cueillant des fleurs en route, elle reviendrait comme l’an dernier, les jours tièdes, visiter sa mère ou chercher le lait et la crème. Oh oui, elle viendrait bien… D’abord, cette pauvre vieille mère, si seule maintenant, serait si contente de la voir souvent…

Tout à coup, il s’arrêta, inquiet, sa main figée dans son geste de semeur ; … si elle n’allait point quitter la ville, Fernande, si elle allait rester là tout l’été… Ceci le rendit soucieux ; et il se représenta combien ce serait triste… pour sa mère…

Après un moment, sa main reprit de nouveau son mouvement régulièrement balancé.

… Depuis trois jours, il travaillait sans relâche, se levant avec l’aube pour ne se coucher que tard dans la nuit, et l’ensemencement de son lopin de terre était presque fini. En retour, il mangeait