Page:Choquette - Claude Paysan, 1899.djvu/222

Cette page a été validée par deux contributeurs.
211
Claude Paysan
 Les corrections sont expliquées en page de discussion

formes diverses, qui descendait comme un voile noir sur son esprit, et qui le faisait visiblement souffrir.

Alors, toutes ses autres idées s’en allaient. Une torpeur pesante seule s’emparait de lui et le roulait dans un remous immense où il se sentait engloutir.

C’était comme si sa chambre, tout le logis, eussent subi tout-à-coup des oscillations. Des fois ça lui donnait des sensations pénibles de vertige et de chute, et ses mains se crispaient sur des riens ; d’autres fois, ce n’était qu’un bercement délicieux et endormant sur d’immatérielles et insaisissables vagues qui ondulaient. Et de longues respirations, irrégulièrement espacées, soulevaient sa poitrine.

Par moment, ça devenait plus net dans son esprit ; il voyait bien qu’il faisait nuit, qu’il ne dormait pas, que les heures sonnaient les unes après les autres, que c’était des fleurs qui étaient devant lui, et qu’il songeait beaucoup seulement.

Puis, de nouveau, le même tourbillon revenait, le reprenait, l’apportait dans des fuites vertigineuses à travers les infinis immenses et brumeux.

Et il ne bougeait toujours pas ; il ne voulait pas bouger.

… Oui, sans doute, il souffrait, mais il souffrait de ce genre de douleur nerveuse qu’on trouve toutefois exquise… Et il jouissait de sentir les minutes s’écouler lentement, d’avoir ce solennel silence de la nuit pour pouvoir mettre en jeu tous les ressorts inconnus de son âme.

Quand il laissait au contraire son esprit s’assoupir, des appels instinctifs, des lambeaux de phrases, de vagues supplications murmurées à demi, des noms