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Claude Paysan
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bien vu l’espèce de patine qui se plaquait sur les eaux et les teintes plombées de l’horizon annonçant l’orage imminent.

— Et ton blé ?… mon pauvre Claude !… lui dit-elle avec un accent de résignation touchante.

Celui-ci n’eût qu’un mouvement soumis d’épaules, en homme que le malheur n’étonne plus.

… Il s’était fait une profonde accalmie. Les rafales, cessées tout à coup faisaient place à quelque chose qui soufflait doucement dans l’air, comme des haleines froides. Les feuilles, légèrement, très légèrement agitées, pendaient en frissonnant frileusement le long des branches. Les flots du Richelieu aussi s’étaient immobilisés dans tout ce calme comme du plomb figé.

En haut, par exemple, de grands nuages gris se démenaient, roulaient, dégringolaient, se culbutaient en tous sens, et, dans leur approche continuelle, ils assombrissaient tout, donnaient aux choses d’en bas des teintes d’une lividité blafarde.

Et de nouveau le vent reprenait en bourrasques soudaines qui chassaient furieusement la poussière et les feuilles, faisaient siffler les arbres.

De larges gouttes d’eau commençaient aussi à tomber, d’abord espacée, puis de plus en plus drues, en faisant des taches grises sur les madriers du perron. En même temps des flamboiements rapides jetaient des éclairs fauves qui creusaient d’éblouissantes fissures dans les nuages.

La mère Julienne, devant cette horreur des éléments, était allée chercher une bouteille d’eau bé-