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des rhumatismes à Majorque. Décidément, il y a quelque chose de pis que notre froid du nord, c’est l’humidité tiède du midi. Je vous dis cela pour votre gouverne quand vous exécuterez vos projets de voyage. Méfiez-vous bien de ces climats jésuitiques qui ne vous avertissent pas et qui vous tombent sur le dos comme des familiers du saint office. Ma fille n’a fait dans tout cela que croître et embellir. Elle a fait beaucoup de progrès dans l’histoire. Elle fait discourir Plutarque à mourir de rire. […] Quand le tems [sic] permettra à Chopin de voyager, nous irons à Paris en passant par Nohant où nous nous arrêterons quelque tems. La Consulesse[1] me promet de venir nous y rejoindre. Vous devriez bien être son chevalier et venir vous reposer, sous mes tilleuls, des fatigues de Paris. Vous savez que j’ai des fleurs, du bon air, du bon lait. Quant aux farces, nous sommes un peu vieux, mais nous en ferons quand même. Vous ferez l’homme à la poupée. Chopin fera l’anglais[2] mon ami Duteil chantera la messe et Solange nous fera du Plutarque. Moi, je vous lirai quelque chose de léger, d’amusant, quelque roman mystique en 40 volumes, si cela ne vous tente pas vous êtes bien difficile ! mais ce qui doit vous attirer seulement chez moi, c’est que vous apporteriez chez nous une grande joie et seriez reçu en Frère. Vous le savez. Adieu chaque fois que vous me donnerez de vos nouvelles vous me charmerez. Chopin me charge de vous presser les deux mains. Il sait combien je vous suis attachée.

  1. La comtesse Marliani, femme du consul d’Espagne.
  2. Comme on le sait, Chopin était un mime merveilleux.