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me comprendre. Personne ne voulut me dire le nom de celui qui m’avait menacé. Je revins sur mes pas et j’appris en route par un agent de police, le nommé Tevero, qui avait été lui-même acteur dans cette atroce comédie, que c’était par ordre du Père Laval qu’on nous tendait tous ces pièges. Je sus également par lui que celui qui m’avait manqué était Niro (employé de la mission).

Ce malheureux Tevero fut cassé et persécuté par le R. P. Laval.

En arrivant près de la résidence, je fis demander à la régente la punition de Niro. Elle me la refusa et m’écrivit qu’il avait bien fait de me chavirer[1]. » Il paraît que cet agent de police, fier de son exploit, était venu se vanter de m’avoir roulé dans la poussière. J’étais donc insulté par une chefesse demi-sauvage, instrument trop flexible d’une politique infernale.

Pour l’honneur du pavillon qui flotte à la corne de mon bâtiment je n’aurais pas hésité à tirer une vengeance éclatante de ce cruel outrage et j’aurais donné à cette horde d’hypocrites et de lâches menteurs une leçon qui leur aurait appris à respecter dorénavant les capitaines des bâtiments de Sa Majesté.

Mais notre noble drapeau, qui abrite ces îles, m’arrêta. Dans des circonstances aussi graves, je réunis les officiers que j’avais l’honneur de commander, et les plus proches parents du feu roi.

Je leur racontai, en détail, ce qui venait de se passer. Après les avoir mis au courant de la situation, j’ajoutai qu’une pareille insulte, faite à un commandant étranger, aurait les conséquences les plus graves ; que, suivant moi, il devenait urgent d’entourer Maria-Eutokia d’un conseil de famille, lequel, sous le titre de conseil de régence, pourrait arrêter bien des injustices et s’opposer aux actes compromettants. »

Tel est le récit de M. Caillet. Afin d’aider à le comprendre nous plaçons ici une carte de l’île avec ses chemins et ses sentiers et nous y marquons les distances à parcourir pour aller de Rikitéa où est le débarcadère, aux autres villages, en suivant, soit le chemin direct, soit le sentier qui contourne la pointe nord

  1. Ceci doit être dû aux interprètes ordinaires Guilloux et Marion. On verra plus loin la lettre de la régente.