Page:Choix de discours de réception à l'Académie françoise, tome I, 1808.djvu/88

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ous côtés ; tout ce qu’il touchoit étoit embelli. Des plus viles herbes des champs, il savoit faire des couronnes pour les Héros ; et la règle si nécessaire aux autres de ne toucher jamais que ce qu’on peut orner, ne sembloit pas faite pour lui. Son style noble et léger ressemboit à la démanche des divinités fabuleuses qui couloient dans les airs, sans poser le pied sur la terre. Il racontoit (vous le savez mieux que moi, Messieurs,) avec un tel choix de circonstances, avec une si agréable variété, avec un tour si propre et si nouveau jusques dans les choses les plus communes, avec tant d’industrie pour enchaîner les faits les uns dans les autres, avec tant d’art pour transporter le lecteur dans le temps où les choses s’étoient passées, qu’on s’imagine y être, et qu’on s’oublie dans le doux tissu de ses narrations. Tout le monde y a lu avec plaisir la naissance de l’Académie. Chacun pendant cette lecture croit être dans la maison de M. Conrart, qui en fut comme le berceau. Chacun se plaît à remarquer la simplicité, l’ordre, la politesse, l’élégance qui régnoient dans ces premières assemblées, et qui attirèrent les regards d’un puissant ministre ; ensuite les jalousies et les ombrages qui troublèrent ces beaux commencemens, enfin l’éclat qu’eut cette compagnie par les ouvrages des premiers académiciens. Vous y reconnoissez l’illustre Racan, héritier de l’harmonie de Malherbe, Vaugelas dont l’oreille fut si délicate