Page:Choix de discours de réception à l'Académie françoise, tome I, 1808.djvu/448

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charme invincible attaché à tout ce qui porte le caractère du génie et du goût, occupoient la nation des ouvrages des grands hommes : leurs pensées, fortes et profondes, forçoient les lecteurs à penser. Les succès des Poètes et des Orateurs, en donnant le désir de les suivre, ôtoient l’espérance de les atteindre. On cherchoit par quelle suite de réflexions ou par quel don de la nature ils étoient parvenus au sublime. Ces recherches étoient une source de raisonnement et de découvertes. Les lettres prenoient insensiblement un nouveau caractère ; elles avoient un nouveau genre d’utilité. Le talent de discuter l’homme et de le régler, vint se placer à côté du talent de l’inspirer et de le peindre : c’est ainsi, Messieurs, que commençoit le troisième âge des lettres et le siècle de la philosophie.

Quels services ne lui a pas rendus une société qui s’occupe du soin de perfectionner la langue ? Entrez sous le portique célèbre de Zénon ; parcourez les allées sombres du Lycée, et voyez une foule d’hommes de génie divisés par les mots seuls, défendre l’un contre l’autre les mêmes opinions ; voyez-les donner des mots pour des pensées, et couvrir sous l’obscurité du langage la partie foible d’un système. Hélas ! ce même abus des mots introduit des sens contraires dans les traités, dans les dogmes religieux et dans les lois : la discorde, les cris de la dispute et les charlatans, éloignent de la terre la paix et la vérité